Oculus Rift DK2 : le test

Image 1 : Oculus Rift DK2 : le test

L’Oculus Rift

Depuis le lancement du projet KickStarter en passant par le rachat par Facebook et les annonces régulières de jeux, démos et autres applications, jamais un casque n’avait fait autant parler de lui avant même sa sortie. Nous avons donc décidé de commander une version DK2 (Development Kit 2) pour tester la prochaine (enfin, c’est à voir…) révolution dans le jeu vidéo. Nous allons vous présenter le produit, son histoire, et essayer de vous donner le ressenti des joueurs, car nous avons fait essayer le casque à beaucoup de personnes dans nos locaux. Attention, nous allons nous intéresser à des points techniques et parler de ressenti, ce qui est compliqué à faire passer. Sans avoir le casque sur la tête, il est très difficile de se rendre compte de la réalité.

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Le premier kit

La première version de l’Oculus Rift est un projet KickStarter, lancé en 2012. Le premier kit de développement a été proposé en septembre 2012 et intègre un écran de 7 pouces en 1 280 x 800. Contrairement à d’autres casques, il n’y a qu’un écran et une définition de 640 x 800 par œil (en simplifiant un peu). L’appareil intègre des capteurs pour gérer les déplacements de la tête, mais ça reste assez limité. Si le casque a ses aficionados dès le départ, il s’agit tout de même d’une démonstration technologique, avec beaucoup de limites.

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Le DK2

Le second casque est une amélioration du premier : on passe à un écran AMOLED 1080p en interne (un écran de Galaxy Note 3, littéralement), soit 960 x 1 080 par oeil. De plus, la position de la tête est prise en compte via des capteurs internes, mais aussi via un capteur externe : une caméra suit le casque pour améliorer ce point. Le DK2 vaut 350 $ (hors taxes) et est livré depuis quelques semaines. C’est le modèle que nous avons testé.

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Les branchements

Brancher le casque n’est pas une sinécure. Le casque lui-même est relié à un petit boîtier (bien plus compact que celui du DK1) qui concentre la connectique. On a donc une prise HDMI mâle (un adaptateur HDMI est fourni), une prise USB, un câble qui part vers un adaptateur secteur et un câble qui part vers la caméra. De plus, la caméra elle-même doit être reliée à l’ordinateur via son propre câble USB. On se retrouve rapidement avec un méli-mélo de câbles, ce qui est peu pratique. Bonne nouvelle, ils sont assez longs pour n’importe quel bureau.

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La caméra

La caméra, qui se branche en USB, n’est pas une simple webcam : elle est équipée d’un filtre qui lui permet de ne voir que l’infrarouge (alors que les webcams classiques ont un filtre qui supprime justement l’infrarouge). Elle sert à positionner le casque dans l’espace : ce dernier contient en fait des LED qui émettent dans le spectre infrarouge, et qui sont donc vus par la caméra. Une photo prise avec un appareil dont le filtre infrarouge n’est pas très efficace montre d’ailleurs ce que voit en partie la caméra.

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L’installation

Le casque DK2 fonctionne sous Windows et sous Mac OS X. Il existe plusieurs modes de fonctionnement, mais — bêta oblige — c’est assez aléatoire. Dans le premier, le Direct Mode, les programmes doivent envoyer directement l’image au casque, et votre écran principal affiche le bureau (par exemple). C’est ce mode que nous avons utilisé sous Windows. Dans le second, l’écran classique et le casque affichent la même image, il a fonctionné sous Mac OS X, mais pas sous Windows avec notre machine de test. En théorie, le premier est plus efficace.

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La configuration minimale

Ce qui fait mal : la configuration minimale. Idéalement, il faut arriver à rendre le jeu dans une définition plus élevée que celle de l’écran (certaines démonstrations le font déjà) avec la fréquence de rafraîchissement de l’écran. Pour un DK2, il faut donc arriver à travailler dans une définition supérieure à 1 920 x 1 080 à 75 fps de façon constante, ce qui nécessite une carte graphique puissante. De plus, la gestion du positionnement de la tête demande beaucoup de travail au CPU, et il n’était pas rare durant nos tests qu’un core soit utilisé à 100 % simplement pour le positionnement. Nous avons testé avec un MacBook Air (Core i7 ULV, Intel HD 4000) et les démonstrations, même simples, sont saccadées. Notre machine de test — Core i5 3570K, Radeon HD 7950 — est quant à elle à peine suffisante pour les jeux les plus lourds en définition native.

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Les lentilles et les aberrations chromatiques

Le choix des lentilles est important, et deux jeux sont proposés. Un adapté aux porteurs de lunettes (elles sont plus courtes) et un jeu pour les gens qui n’en portent pas. Il est aussi conseillé de régler correctement les paramètres dans les outils fournis, en indiquant votre taille et en adaptant les réglages à votre poste de travail. De même, il faut régler la distance entre les deux yeux, qui est par défaut sur une valeur de 64 mm (une valeur moyenne). Enfin, il est conseillé de modifier un fichier DLL pour limiter les aberrations chromatiques : un post sur Reddit propose des DLL modifiées avec une valeur plus adéquate que celle par défaut, mais il est possible de la modifier manuellement.

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Ca donne quoi ?

Et maintenant, ça donne quoi ? Nous avons testé avec différentes personnes chez Purch, des membres de la rédaction, mais aussi des graphistes et des personnes qui ne sont pas des joueurs au départ. Globalement, l’Oculus Rift intrigue : tout le monde veut essayer, et les gens sont généralement emballés au premier contact. Pourtant, ça ne passe pas toujours. Sur les démonstrations lentes, comme celle fournie par OculusVR, le ressenti est bon : c’est lent, il faut se promener, c’est assez onirique, la sensation d’immersion est bonne… mais c’est une simple démonstration.

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Les démonstrations

Comme il s’agit d’un kit de développement, on trouve majoritairement des démonstrations sur l’Oculus Rift. Plusieurs catégories sont proposées, et les plus impressionnantes sont celles qui simulent des attractions de foire. Les démos de RiftAway sont efficaces pour montrer l’immersion dans des mondes qui bougent : montagnes russes, voyages dans l’espace, manèges, tout y passe. Se retrouver dans un appareil qui simule une attraction qui nous envoie à des dizaines de mètres de hauteur fait peur, sans vraiment rendre malade, ce qui est un bon point. Les montagnes russes, par contre, ont tendance à provoquer des nausées, le cerveau n’arrivant pas à interpréter les mouvements.

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Une ballade dans l’océan

Une démonstration qui a eu beaucoup de succès, c’est Ocean Rift. Il s’agit simplement d’aller nager avec les animaux dans la mer (baleines, poissons, etc.), et c’est immersif. Les mouvements sont assez lents pour éviter les nausées et le rendu est très agréable.

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Les (rares) vrais jeux

En attendant Elite Dangerous et d’autres, on trouve tout de même quelques jeux. En dehors de quelques adaptations assez moyennes (comme Quake 2), ce sont Half Life 2 et Euro Truck Simulator qui sont intéressants. Dans le premier, qui est compatible depuis peu avec le DK2, on peut refaire le jeu mythique avec le casque : effet de 3D, possibilité de tourner la tête pour examiner les décors, c’est très convaincant et fluide, étant donné l’âge du jeu. Une version adaptée au Razer Hydra existe même. L’installation est simple : il suffit d’activer la bêta dans Steam et un bouton permet de passer dans le casque. 

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Euro Truck

Euro Truck Simulator 2 est un des autres (rares) jeux compatibles. Il permet simplement de tourner la tête dans la cabine du camion, ce qui rend le tout bien plus immersif. C’est très efficace et très fluide sur notre machine de test.

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Les films

L’Oculus Rift peut aussi servir à regarder des films. Des logiciels spécialisés existent pour lire des vidéos en 3D directement dans le casque, mais il faut évidemment des contenus adaptés. Il est possible de trouver des vidéos de démonstration et — plus ou moins légalement — des films entiers en 3D. Le problème, c’est qu’on perd en définition par rapport à un téléviseur 3D classique et que la puissance nécessaire reste élevée pour adapter l’image à l’Oculus Rift. Quelques rares vidéos en « réalité virtuelle » existent aussi, mais il s’agit souvent de petites démonstrations dans lesquelles il est possible de tourner la tête.

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Les trucs pour adultes

Comme souvent avec les nouvelles technologies, le monde des contenus pour adultes s’intéresse à l’Oculus Rift. On trouve essentiellement deux types de contenu : des vidéos en « réalité virtuelle », filmée du point de vue d’un des acteurs et avec la possibilité de tourner la tête, et des contenus qui doivent être couplés à des périphériques externes dédiés aux adultes (nous vous passerons les détails). Nous avons essayé, pour la science, le premier cas : c’est assez déroutant, on peut tourner la tête dans un film pour regarder autour de soi et donc changer en partie de point de vue. L’intérêt reste limité et les contenus doivent être prévus au départ pour la réalité virtuelle, ce qui demande de gros investissements.

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Les nausées et les réactions

Le principal problème vient des nausées et de ce qu’on appelle la cinétose. Plus concrètement, certaines personnes réagissent mal quand les mouvements perçus visuellement ne sont pas ressentis par les autres sens, ce qui peut provoquer des nausées. Le DK2 réduit ce problème avec le suivi de la tête et une latence plus faible, mais il reste présent et dépend énormément des gens. Ce problème dépend aussi de ce qui est affiché : quand on est assis, avec des mouvements lents, il n’y a généralement pas de problèmes. Dans un FPS rapide avec des mouvements de tête violents, c’est évidemment beaucoup plus courant. Une solution est de ralentir les mouvements (quand le jeu le permet), mais il faudra attendre les prochaines versions du casque pour essayer de réduire encore un peu le problème.

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L’absence de retour extérieur

Le principal problème du casque, c’est l’absence d’interaction avec le monde réel. Typiquement, la majorité des démonstrations demande d’utiliser la souris ou de presser une touche précise, ce qui n’est pas trivial : il faut généralement enlever le casque ou demander à une autre personne de le faire. Dans certains cas, les menus sont adaptés avec une gestion en fonction de la position de la tête, mais c’est rare et imprécis. Dans l’absolu, et c’est visiblement la solutions choisie par le futur casque, il faudrait une caméra à l’avant du casque pour permettre de voir le clavier et la souris, soit en l’intégrant directement dans l’univers virtuel soit en réalité augmentée. L’usage d’une manette de jeu est pour le moment une solution intéressante, du moins pour les joueurs qui savent où se trouvent les boutons instinctivement.

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L’immersion

Un autre problème de l’absence de retour, c’est qu’une fois dans le jeu avec un casque sur les oreilles, on est parfois un peu trop immergé. Nous avons eu le cas lors de nos tests : la personne portant le casque continuait à parler à une personne qui était partie faire autre chose. Les photos compromettantes ou amusantes ne sont évidemment pas loin…

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La grille, l’angle de vue et le black smearing

Il y a trois soucis que nous ne pouvions pas ne pas évoquer, même s’ils sont liés à un kit de développement. Le premier, c’est la grille, qui reste visible. Même avec un écran plus petit (5,7 pouces contre 7 pouces) et une définition plus élevée (1080p contre 1 280 x 800), la grille reste visible sur le DK2. On voit la différence entre les pixels, et ça limite l’immersion. La seule solution serait d’utiliser un écran plus petit (pour limiter l’espace entre les pixels) et avec une définition plus élevée. Le second, c’est le FOV (angle de vue), un peu léger sur le DK2 (et même plus faible que sur le DK1). Une solution serait d’utiliser un écran plus large. Enfin, l’écran OLED pose des soucis de black smearing, c’est-à-dire des changements de couleur intempestifs quand on passe du noir profond à la lumière. La solution est ici de rendre des noirs un peu moins profonds et de changer de technologie.

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Qu’attendre du CV1 ?

Maintenant, qu’attendre de la version finale du casque ? Premièrement, un écran plus défini, plus rapide et peut-être plus large. Idéalement une dalle en 3 440 x 1 440 capable de travailler à 90 Hz et en RGB. On peut aussi espérer une technologie équivalente au G-Sync de NVIDIA, pour limiter les saccades quand l’ordinateur n’est pas assez puissant. Deuxièmement, un système permettant de « sortir » du casque, comme une caméra pour voir son clavier, par exemple. Enfin, on peut espérer des améliorations sur le suivi de la tête, même si le DK2 est assez efficace sur ce point. Ici, on voit un produit intermédiaire entre le DK1 et le DK2, le Crystal Cove.

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Est-ce vraiment l’avenir ?

La question qui fâche : est-ce vraiment l’avenir ? Pas réellement selon nous. C’est un accessoire vraiment impressionnant, très efficace et bien fini. C’est l’expérience de réalité virtuelle la plus convaincante du moment. Mais ce n’est pas l’avenir. D’abord parce que si l’immersion est intéressante, elle coupe aussi totalement le joueur de son environnement, ce qui est un vrai problème. Pour un joueur isolé dans une pièce, c’est envisageable, mais pas dans tous les cas. Deuxièmement, mais c’est un point qui peut évoluer, l’Oculus Rift rend encore malade. Lors de nos tests, beaucoup de personnes (environ un tiers de nos testeurs) ont eu la nausée, même dans des démonstrations assez légères. Si OculusVR travaille sur ce point, rien ne dit qu’ils arriveront à supprimer totalement ce souci. Ensuite, le casque reste assez cher et peu de jeux sont compatibles. Il faut compter 350 $ (H.T.) pour le modèle de développement et le modèle final ne devrait pas être beaucoup moins cher. On tombe donc dans un cercle vicieux : sans casque, pas de jeux, sans jeux, personne n’achète le casque. Enfin, ça reste un accessoire parce que ce n’est pas adapté à tous les types de jeux : le sport, la plateforme, la baston, beaucoup de jeux à succès ne sont tout simplement pas adaptés à la réalité virtuelle… La photo montre un simulateur qui permet de littéralement changer de peau avec une autre personne.

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Faut-il l’acheter ?

Faut-il acheter le DK2 ? Non. Oculus VR l’indique bien, c’est un produit qui est prévu pour les développeurs. Il a des défauts, il y a encore des bugs et certaines choses sont perfectibles. Pour ceux qui ont un gros budget et qui veulent découvrir la réalité virtuelle, c’est éventuellement une option, mais dans la majorité des cas, il est préférable d’attendre la version finale. De plus, il est assez simple de trouver des casques en démonstration, avec des démos adaptées, ce qui permet de se faire une idée du résultat et — surtout — de vérifier comment votre estomac va réagir…