Test : les cartes mères X299 sont-elles vraiment désastreuses ?

X299 et Skylake-X : état de la polémique

Qu’est-ce-qu’on n’a pas lu ou entendu depuis quelques semaines sur les sites hardware et les chaines YouTube ! « Désastre VRM », « TIM-gate » (Thermal Inferface Material, la pâte thermique interne), Intel se fabrique son propre bûcher, etc.…

On a vu une surenchère de titres alarmistes donnant l’impression d’un naufrage de la nouvelle plateforme Intel, alors qu’à l’origine du problème, on a avant tout un CPU qui consomme et chauffe énormément, ce qui a de multiples conséquences.

Mais avant de plonger dans les détails, essayons de résumer les points clés de cette polémique qui fait rage, pour servir de points de départ à notre investigation.

  • Les Skylake-X aux fréquences fixées par Intel sont déjà très difficiles à refroidir en raison d’une consommation extrêmement importante dans certains cas de figure, et d’une pâte thermique qui n’évacue pas la chaleur assez vite et agit comme un goulot d’étranglement thermique.
  • Il est presque impossible pour le commun des mortels d’overclocker ce processeur et beaucoup de cartes mères ne fonctionnent pas correctement ou sont mal conçues (absence de refroidissement des VRM, sous-dimensionnement des dissipateurs).

Système de test et méthodes de mesure

Pour voir ce qu’il en est vraiment, nous nous sommes procurés une carte mère de milieu de gamme avec socket 2066 que nous avons placée sur une table de benchmark orientée à la verticale, comme dans la plupart des configs. Nous l’avons équipée d’un Core i9-7900X.

Nous allons étudier les mesures des différents capteurs et nous les compléterons par notre caméra infrarouge capable de mesurer sans contact la température du PCB au niveau du socket CPU et des convertisseurs de tension.

Grâce à elle, nous pouvons aussi documenter la phase d’échauffement et de chauffe maximale. Nous présenterons les résultats sous la forme d’une vidéo en accéléré. Nous sommes en effet curieux de voir si éventuellement d’autres composants sont concernés par les points chauds présents sur la carte mère.

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Pour que les données communiquées par les capteurs soient lues correctement, nous avons flashé le BIOS de la carte mère et installé la dernière version de HWiNFO (Beta 5.53-319).

La carte mère dispose de 5+1 phases d’alimentation CPU contrôlées par un IR35201 d’International Rectifier. Ce contrôleur buck multiphases est compatible avec les normes VR12.5 Rev 1.5 d’Intel, mais aussi, semble-t-il, le VR13. Les phases sont doublées en deux rails de VRM, pour réduire la charge imposée à chacun d’eux et augmenter la surface de dissipation de la chaleur.

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Les convertisseurs de tension sont des IR3555 PowIRstage à 60 A. Ces puces intègrent driver, MOSFET en high- et low-side et diode Schottky. Comme la plupart des MOSFET, ils ne possèdent pas de capteur de température. Comment est-il alors possible de mesurer leur température, sans être équipé d’une caméra infrarouge ?

MSI utilise sur cette carte mère une puce Nuvoton NC6795D dont la fonction est de récolter les données envoyées par des capteurs de température placés à différents endroits stratégiques sur la carte mère pour ensuite les transmettre. La température des convertisseurs de tension est obtenue à l’aide d’un thermistor placé juste à côté d’un MOSFET. Pour notre vidéo infrarouge, nous avons donc placé notre point de mesure exactement à cet endroit sur la face arrière du PCB.

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Nous mesurerons aussi les températures des bobines et des condensateurs et bien sûr celle du PCB directement sous le CPU.

Baisse de fréquence forcée et arrêt d’urgence

Il est important de noter que les constructeurs de cartes mères utilisent des mécanismes de sécurité pour éviter la surchauffe. Sur notre exemplaire par exemple, dès que le thermistor atteint 105°C, (dans HWiNFO, il est nommé MOS parmi la série de capteurs gérés par la Nuvoton NCT6795D), la fréquence du processeur Skylake-X est abaissée à 1,2 GHz et ce, jusqu’à temps que la température ait baissé à 90°C. Ensuite, la limitation est levée.

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C’est une mesure de protection est bienvenue car, même si le matériau dans lequel est fabriqué le PCB est à la norme FR4 et ne s’enflammera pas, la température maximale recommandée en utilisation prolongée se situe entre 95°C et 105°C. Au-delà, il est possible que les couches superposées du PCB se décollent les unes des autres, qu’elles se plient, voire se fissurent. C’est un problème que nous pointons régulièrement dans nos tests de cartes graphiques.

Pour ceux qui utilisent Intel Extreme Tuning Utility (XTU), cette baisse de fréquence est reconnue comme « thermal throttling »  en jaune, sans préciser de quel composant il s’agit vraiment.

La puce IR35201 communique aussi des températures, mais elles sont lues par HWiNFO de manière inappropriée. Les deux valeurs communiquées, VR T1 et VR T2 sont toujours identiques, paraissent bien plus élevées qu’on pourrait s’y attendre et semblent donc inexactes. Ce contrôleur PWM que nous connaissons bien, puisqu’il est aussi présent sur de nombreuses cartes graphiques AMD, communique en fait une température de manière exacte, mais pas celle qu’on pourrait croire : il s’agit en fait de sa propre température !

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Comme beaucoup de composants électroniques, ce contrôleur PWM ne peut fonctionner correctement et de manière stable qu’à une certaine plage de températures au-delà de laquelle la gestion de la conversion du courant pourrait souffrir. Il possède donc des valeurs maximales à partir desquels des systèmes de sécurité s’activent. La première limite est fixée à 125°C, au-delà, le CPU est bridé à 1,2GHz et XTU indique Motherboard VR throttling : yes.

Si la température dépasse 135°C, la carte mère s’éteint automatiquement pour éviter que les tensions ne s’emballent et causent des dégâts matériels irréparables.

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Le CPU aussi se protège de trop fortes températures. Il intègre plusieurs capteurs de température digitaux (DTS) qui surveillent la température au sein des cœurs et du package. Il s’agit de valeurs théoriques dont la précision augmente avec la température. En dessous de 40°C, ils ne sont pas fiables. A partir de 80°C, on peut dire qu’ils sont précis. On voit aussi que la température des cœurs et celle du package peuvent aussi conduire à une réduction de la fréquence.

La température du package (Tpackage) intègre surtout la chauffe des IVR, c’est à dire des convertisseurs de tension intégrés au CPU, censés fournir la tension désirée aux différentes parties du CPU. Dans le cas d’un overclocking conduisant à une augmentation de la tension, on peut vite atteindre les limites de températures prescrites, sans que les outils de monitoring ne le signalent. La fréquence CPU baisse, mais l’utilisateur ne sait pas pourquoi. Nous reviendrons plus en détails sur les IVR.

Une baisse de fréquence du CPU peut avoir pour cause une température trop haute d’un cœur ou du package CPU, ce qui est le plus probable, mais peut aussi être provoquée par la puce de monitoring de la carte mère en raison de températures des VRM ou du contrôleur PWM trop importantes qui pourraient causer une instabilité de l’alimentation électrique. Contrairement à ce que beaucoup croient, le contrôleur PWM ne peut, par contre, pas livrer directement la température des VRM.

Système de testImage 7 : Test : les cartes mères X299 sont-elles vraiment désastreuses ?

Equipement de test
Système
Intel Core i9-7900X
MSI X299 Gaming Pro Carbon AC
4x 4GB G.Skill Ripjaws IV DDR4-2600
Nvidia Quadro P6000
Eizo FlexScan EV3237-BK

1x 1 To Toshiba OCZ RD400 (M.2, système)
2x 960 Go Toshiba OCZ TR150 (stockage)
Be Quiet Dark Power Pro 11, 850W
Windows 10 Pro
RefroidissementAlphacool Eiszeit 2000 Chiller
Alphacool Eisblock XPX
Thermal Grizzly Kryonaut (pour le Cooler Switch)
Mesure de consommation
Mesures sans contact sur le slot PCIe (utilisant un riser)
Mesures sans contact sur un câble d’alimentation externe PCIe
Mesures directes de tension sur l’alimentation
2x Rohde & Schwarz HMO 3054, 500MHz Oscilloscope numérique multi-canal avec fonction de stockage
4x Rohde & Schwarz HZO50 Current Probe (1mA – 30A, 100kHz, DC)
4x Rohde & Schwarz HZ355 (10:1 Probes, 500MHz)
1x Rohde & Schwarz HMC 8012 multimètre numérique avec fonction de stockage
Mesure thermique
Caméra infrarouge 1x Optris PI640 80Hz

Les limites d’usine du CPU 7900X

De la pâte thermique plutôt qu’une soudure

L’une des raisons du refroidissement insuffisant des processeurs vient de l’utilisation par Intel d’une pâte thermique au lieu d’une soudure à base d’indium beaucoup plus efficace, mais aussi plus onéreuse. On peut discuter de la résistance de ces soudures après plusieurs années, des microfissures pouvant en effet se former, mais l’expérience a aussi montré que des puces d’une surface autrement plus importante restaient adéquatement refroidies année après année.

De plus, les pâtes thermiques ne pas non plus exemptes de problèmes de durabilité. Ces pâtes ont tendance à suinter leur huile. La pâte durcit et les côtés de la puce sont maculés d’huile. Ce phénomène n’est pas aussi marqué sur toutes les pâtes, mais toutes sont concernées.

Mais pourquoi revenons-nous encore sur cet aspect ? La courbe suivante issue de l’article de lancement du Core i9-7900X d’Intel,et qui a été réalisée avec notre refroidisseur ultra puissant, montre très clairement que la chaleur est très mal évacuée ! Si cette solution était encore viable sur un Core i7-7700K, elle s’avère tout simplement absurde pour des processeurs plus gourmands. La méthode utilisée pour obtenir ces résultats est décrite en détails dans l’article de lancement.

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La courbe suivante montre la différence de température entre le heatspreader et les cœurs du CPU, un écart plus que choquant :

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Alors que notre système de refroidissement à base d’un refroidisseur Chiller, d’un bloc de refroidissement Alphacool XPX et de pâte thermique Thermal Grizzly Kryonaut représente le top du top de ce qui peut se faire en la matière, on observe jusqu’à 71°C de différence entre les cœurs et le heatspreader ! Inutile d’imaginer ce que cela donne avec des refroidisseurs plus grand public en pleine charge ! AMD a pourtant démontré avec les Ryzen 7 que l’on pouvait faire beaucoup mieux, même si l’histoire des températures artificiellement augmentées sur les modèles X a été aussi source d’incompréhension.

Les mauvaises langues prétendront aussi qu’Intel a volontairement bridé ses processeurs en livrant des CPU à difficiles à refroidir par défaut et donc impossibles à overclocker. Nous n’irons pas aussi loin.

L’évacuation de la chaleur émise par le CPU est restreinte par l’utilisation d’une pâte thermique (TIM) peu efficace entre le heatspreader et le die. Quelle que soit la pression exercée et quelle que soit la qualité du refroidissement, le potentiel du CPU s’en trouve largement limité. Intel, volontairement ou non, a donc bridé thermiquement ses CPU de la façon la plus bête qu’on puisse imaginer.

Décapsulage du heatspreader, la solution miracle ?

On pourrait en conclure qu’il suffit d’ôter le heatspreader et la pâte thermique pour solutionner tous les problèmes. Cette solution est pourtant loin d’être idéale pour l’utilisateur lambda. Car pour décoller un heatspreader, il faut les outils appropriés, de l’expérience et beaucoup de doigté. Et on perd surtout la garantie constructeur !

En se basant sur la peur ou bien l’inexpérience des acheteurs, un certain nombre d’acteurs ont développé des solutions telles que des kits de décapsulage ou même des CPU sans heatspreader, avec ou sans garantie. La solution idéale pour notre overclockeur en herbe ? Loin de là, puisqu’un die nu est extrêmement fragile et requiert beaucoup plus d’expérience que ce que prétend l’industrie des guillotines pour CPU.

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Bien sûr, le décapsulage est facilité par un tel kit : on peut compter le nombre de tours de vis effectués sur chaque côté du heatspreader et limiter le risque de casse. Mais par ce procédé, le prix à la revente du processeur chute dramatiquement et le processeur perd sa garantie.

Le décapsulage du heatspreader peut résoudre le problème de surchauffe du CPU, mais cela reste une solution de niche qui doit seulement être envisagée par ceux conscients du risque important encouru et prêts à l’accepter. Une fois décapsulé, on perd irrémédiablement la garantie constructeur.

Les convertisseurs de tension internes des Skylake-X

Observés pour la dernière fois sur des processeurs Haswell, disparus entre temps, les FIVR (Fully Integrated Voltage Regulators) font leur retour sur les Skylake-X. Un come-back, cette fois-ci comme simples IVR, qui n’est cependant pas sans poser problème. En effet, derrière ce retour se cache une manière différente d’alimenter les processeurs que pour les Kaby Lake-X. Les VRM de la carte mère ne sont en effet pas censés fournir la tension Vcore, mais plutôt une tension intermédiaire Vccin. Cette tension oscille entre 1,6 et 2,55 V maximum.

C’est d’ailleurs cette différence qui a couté la vie à quelques processeurs Kaby Lake-X en amont du lancement officiel. En effet, en passant d’un processeur Skylake-X avec une tension minimum de 1,8 V à un Kaby Lake-X, puis en rallumant la machine sans avoir auparavant réinitialisé les paramètres par défaut (reset BIOS), les VRM de la carte mère envoyaient la Vccin au lieu de la Vcore et grillaient la puce ! Juste une anecdote en passant.

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À partir de cette fréquence déjà fortement réduite, les IVR produisent la tension Vcore pour les cœurs, les tensions partielles pour les low level caches, ring interface, PLL, Vccio (IO), Vccsa (system agents) et Vcc33 (PIROM). Comme évoqué plus haut, ces tensions sont obtenues à partir du Vccin des VRM de la carte mère, lesquels sont régulés par le CPU via le SVID-Bus (Serial Voltage ID) et le contrôleur PWM IR35201 qui supporte VR13. Cette tension VID est ainsi comparable à la Vcc des anciens CPU.

Valeurs maximales des Skylake-X et fréquences maximales

Bien qu’Intel spécifie le TDP du CPU à seulement 140W, l’intensité maximale de Vccin est spécifiée à 190 A et la valeur Pmax package maximale à 297 W. Nos essais avec des valeurs nettement plus importantes à 365 W ont mené l’extinction d’urgence de la carte mère.

Une consommation de 300W pour Vccin est bien trop élevée pour un overclocking, le consommation CPU étant en effet largement au-dessus du TDP. Pour un overclocking stable et durable, il faut plutôt viser un maximum de 250W, beaucoup plus réaliste mais toujours très ambitieux.

Si on veut rester tout à fait juste et comparer la consommation de différents CPU, il faudrait soustraire, pour les Skylake-X, la perte de courant au niveau des IVR. Dans des situations extrêmes où Pmax Package est à son maximum, les pertes à ce niveau peuvent monter à plusieurs dizaines de Watts.

Cartes mères : les petites combines de triche

Des cartes mères pas prêtes

La première salve de critiques bien en amont du lancement de la plateforme est venue de la part des fabricants de cartes mères. Normalement, ceux-ci prennent un kit de watercooling all-in-one classique, comme on en trouve par dizaines dans les labos des fabricants, le placent sur un Core i7-7900X et commencent leur boulot. Ils élaborent un BIOS qui répond d’une part aux spécifications listées par le fabricant de processeurs, et d’autre part, se démarque si possible de la concurrence. Le tout fonctionnant de manière fiable, cela va sans dire.

Cette fois-ci, ça ne s’est pas vraiment passé aussi bien. La faute à Intel et un lancement anticipé ? Avant la levée de l’embargo imposé par Intel, aucune des cartes mères testées dans notre labo ne fonctionnait correctement : problème de P-states, fréquences Turbo Boost erronées, etc.

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Des BIOS un peu trop taillés pour les performances

Si Intel n’est pas exempt de critique, loin de là, nous avons été estomaqués de constater que tous les constructeurs de cartes mères avaient, d’une manière ou d’une autre, triché avec les spécifications. Comparons la carte Asus Prime X299-Deluxe et la MSI X299 Gaming Pro Carbon AC (testée par notre collègue Thomas Soderstrom chez Tom’s Hardware US). Alors qu’Asus maintient la consommation à un niveau tolérable, MSI ouvre les vannes sans se soucier des conséquences. Pas étonnant, dans ces conditions que la chaleur dégagée explose :

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Comme Prime95 n’est pas un outil de benchmark à proprement parler, il faut interpréter d’où vient cette différence. D’une part, on trouve dans le BIOS de la carte MSI une ligne Enhanced Turbo qui est automatiquement activée par défaut. Ce paramètre est extrêmement bien caché, et pour l’afficher, il faut simultanément activer l’affichage de paramètres avancés du BIOS et le mode Expert OC. Le mode Turbo Boost 2.0 prévoit normalement qu’au maximum deux cœurs peuvent simultanément tourner à 4,3 GHz. Mais avec Enhanced Turbo activé, ce sont tous les cœurs qui besognent à 4,3 GHz. C’est donc par défaut un overclocking conséquent qui s’accompagne également d’une hausse de la tension.

Plus étonnant encore, à 4 GHz pour tous les cœurs et l’option Enhanced Turbo désactivé, notre processeur consommait 230 W, alors qu’à 4,3 GHz dans Prime95, ce n’était que 160 W en moyenne (avec des pics jusqu’à 230 W). Intel semble donc mettre un peu le holà lorsque les instructions AVX sont utilisées.

Dans Cinebench, qui n’utilise pas les instructions AVX, on obtient un score de 2169 à 4 GHz, tandis qu’avec Enhanced Turbo activé (à 4,3 GHz donc), la consommation s’envole à 190 W, alors que le score ne monte qu’à 2312. On gagne donc 6,6% de performance pour une fréquence 7,5% supérieure, mais 31% de consommation en plus ! Ce gain modeste se fait donc au prix d’une explosion de la conso sans commune mesure.

Une autre manière de gonfler artificiellement les performances consiste à modifier le seuil à partir duquel le mode Turbo Boost est activé : placer le seuil à 5% ou bien à 10% de charge peut faire apparaître la carte comme plus performance que la concurrence. Après tout, pourquoi pas ? Ce ne sont pas les constructeurs qui payent la facture d’électricité.

Sans overclocking : 160 et 230 W

Revenons aux convertisseurs de tension et testons ce que notre carte mère est capable de supporter « par défaut ». Dans les deux scénarios décrits plus haut, c’est à dire pour une charge constante de 160 W (un peu au-dessus du TDP donc), et pour une autre à 230 W, qui représente le maximum de ce qu’on peut atteindre de manière logicielle sans overclocking. Un cas de figure rare au quotidien.

Nous comparons aussi les températures relevées par les capteurs et celles de notre caméra infrarouge pendant le test de 20 minutes que nous avons aussi enregistré dans une vidéo en accéléré.

160 W et plus : un minimum élevé

Le graphique et la vidéo montrent que le CPU tient assez bien la température, ce qui est en grande partie dû à notre refroidisseur Chiller. La température package est plus élevée que celle des cœurs. Nous avons recommencé le test avec un système de watercooling all-in-one et les températures restaient acceptables. Le refroidissement par air n’était par contre pas à la hauteur et la fréquence processeur baissait après seulement quelques minutes.

La courbe montre aussi que la consommation monte parfois jusqu’à 230W. Le CPU régule dynamiquement la consommation de manière à offrir une performance optimale.

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Pas de souci à se faire du côté des convertisseurs de tension de la carte mère, qui restent à des températures raisonnables.

On monte à 230 W

La consommation maximale envisageable sans overclocking est de 230 W. Celle-ci s’entend avec Enhanced Turbo désactivé. La courbe de consommation est bien plus lisse, en contrepartie, tous les composants chauffent beaucoup plus. Les convertisseurs de tension ont fort à faire pour fournir autant de courant de manière constante.

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Les VRM atteignent environ 90°C, ce qui n’est pas préoccupant. La marge de manœuvre pour rester dans les spécifications de température (105°C max) n’est par contre pas très élevée : 15°C ne laissent pas beaucoup de liberté pour overclocker.

En jeu, le Core i9-7900X est largement moins gourmand puisqu’il se satisfait de moins de 100W. Cette « frugalité » démontre que ce CPU n’est pas fait en première ligne pour jouer. Son installation dans une config « gamer only » étant finalement une perte d’argent. À ce niveau de conso, le CPU est évidemment bien plus facile à refroidir, mais ce n’est pas vraiment le sujet de ce test.

Sans overclocking, et selon qu’on active ou pas le mode Enhanced-Turbo, la consommation peut dépasser 230 W en utilisant les instructions AVX et tout de même 200 W sans ces instructions énergivores. À ce niveau, un refroidissement par air est déjà largement hors-jeu en raison de la mauvaise conduction thermique au sein du CPU. Une solution de watercooling all-in-one peut encore faire l’affaire. Dans tous les cas, on se rapproche déjà dangereusement des limites de températures du package et des cœurs.

Overclocking manuel : 250 et 300 W

Une vidéo pour tout montrer

X299 vs Skylake-X

Un overclocking de puissance, pas de fréquence

Nous voulons enquêter les éventuels problème de la plateforme X299 + Skylake-X, mais nous en avons profité pour satisfaire notre curiosité sur la marge d’overclocking du processeur. Nous l’avons toutefois poussé à 250 W et 300 W, car c’est ce que ses spécifications autorisent. Nous ne sommes pas là pour détruire un CPU ou une carte mère, surtout qu’à la différence des overclockeurs pros, nous ne nous faisons pas livrer les puces en plusieurs exemplaires ! Nous sommes donc plutôt bienveillant sur les mesures de protection du matériel, mais vous allez voir que ces limites ont déjà suffit à révéler le problème.

250 W : les limites d’un watercooling classique

Souvenez-vous : 250 W, c’est ce qu’il fallait à un Core i7-5960X pour atteindre 4,8 GHz sur ses huit coeurs. L’actuel Core i9-7900X touche les 250 W à 4,5 GHz sur ses 10 coeurs en condition extrême sous Prime95, et 4,6 GHz dans LuxRender. Le Core i9-7820X à huit cœurs ne fait guère mieux : seulement 20 W de moins que le 7900X.

Dans notre scenario, la consommation ne dépasse jamais les 270 W. Le problème, c’est que même un bon refroidissement à eau ne parviendra pas à éviter le throttling du processeur après 10 minutes de charge.

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A cause de sa température interne, le processeur réduit sa fréquence bien avant que les VRM de la carte mère aient la moindre chance d’atteindre les 100°C.

300 W : et là, c’est le drame

Il nous a fallu utiliser la manière forte pour atteindre les 300 W manuellement : d’abord en utilisant le refroidisseur de watercooling Alphacool Eiszeit 2000 Chiller. En gros, c’est un réfrigérateur qui maintient l’eau à 20°C même à très forte charge. Le processeur semblait tenir le coup, mais au bout de 10 minutes, les VRM de la carte mère ont dépassé les 105°C et la fréquence du CPU a brusquement chuté à 1,2 GHz (70 W de consommation). Un phénomène qui s’est répété de manière cyclique.

Il s’agit donc ici bien d’un problème de throttling au niveau des VRM de la carte mère, qui chauffent trop et doivent donc couper l’afflux d’énergie au CPU et donc sa fréquence. Néanmoins, même avec notre solution de refroidissement un peu folle, le 7900X montrait aussi des températures très élevées : plus de 100°C pour le package, et plus de 94°C pour les coeurs. Vous imaginez bien que pour ce CPU, un delid avec remplacement de pâte thermique est totalement indispensable.

Image 17 : Test : les cartes mères X299 sont-elles vraiment désastreuses ?

Notez que malgré les 105°C que vous pouvez voir en vidéo, aucun composant n’excède ses températures limites, et il n’y pas de risque de dommage à court termes, ce qui est déjà pas mal.

Conclusion

Les devoirs des fabricants de cartes mères

Image 18 : Test : les cartes mères X299 sont-elles vraiment désastreuses ?

En fin de compte, nous avons constaté des consommations similaires à celles d’une carte graphique haut de gamme dès que nous commençons à taquiner Skylake-X. Même le processeur AMD FX-9590X n’égale pas ces consommations démentielles. Voilà qui oblige les fabricants de cartes mères à dépenser plus d’argent dans des composants et des solutions de refroidissement adaptés à ce genre de situation. Par ailleurs, garantir un bon fonctionnement à long termes risque d’être d’autant plus délicat. Les composants « ultra-durable » et « military class » doivent donc, pour la plateforme X299, être aussi présent sur les modèles milieu de gamme.

Les fabricants de cartes mères auraient pu, et auraient du savoir que les processeur Skylake-X allaient être très gourmands, malgré les TDP ridiculement faibles annoncés par Intel.

Plusieurs cartes mères seront affectées, à différente intensité, par nos constatations. Celle que nous avons testée, la Gaming Pro Carbon AC, fait partie du haut de gamme, mais elle n’est pas LE modèle fleuron de MSI (qui est la future XPOWER Gaming AC). A vrai dire, les fabricants de cartes mères n’ont pas eu le temps de développer des modèles ultra-blindés, très haut de gamme, pour coller avec la sortie des Skylake-X d’Intel.

Il est impossible de généraliser nos résultats pour parler de « désastre » inhérent aux VRM sur les plateformes X299. Il faudrait tester toutes les cartes mères des fabricants, à différentes classes de prix. De ce que nous constatons, le problème se place au niveau du heatspreader du CPU Intel, mais aussi au niveau de la fabrication de la carte mère.

Nous allons recevoir une nouvelle carte mère, très haut de gamme cette fois, toujours de MSI, la fameuse XPOWER Gaming AC. Et nous lui ferons subir la même batterie de tests !

Conclusion

Image 19 : Test : les cartes mères X299 sont-elles vraiment désastreuses ?Que penser finalement ? Ici, Intel pousse encore ses processeurs avec un genre de Xeon overclocké en usine, chargé de s’imposer chez les CPU très haut de gamme grand public. Nous commençons à avoir le sentiment que l’architecture Core, vénérée sans démériter, arrive à la limite de ses possibilités. Tout fonctionne encore bien ici, et si Intel avait apporté plus de soin au transfert thermique entre le die et le heatspreader (soudure ou meilleure pâte thermique), l’histoire se serait encore mieux terminée pour tout le monde.

A ce stade, même un watercooling custom doit jeter l’éponger à 250 W, bien avant que l’étage d’alimentation de la carte mère ne pose le moindre problème. On parle donc ici d’un overclocking à 4,5 GHz stable avec AVX pour le 7900X. Du coup, dans des conditions relativement normales, c’est toujours le CPU qui va atteindre ses limites, avant la carte mère.

Néanmoins, les fabricants de cartes mères ne sont pas exempt de tout reproche non plus. Avec un peu plus d’expertise en thermodynamique (dissipation de chaleur), et moins de pièces plastiques tape-à-l’œil (comme sur la Gaming Pro Carbon AC), il aurait été possible d’offrir des cartes mères à l’étage d’alimentation un peu plus résistant pour les overclockeurs forcenés qui dépasseront les 250 W pour taquiner les 300 W, avec décapsulage (delid) et remplacement de pâte thermique obligatoire.