La France a ouvert une enquête sur Apple après une plainte de la Ligue des droits de l’Homme, mettant en cause la gestion des enregistrements vocaux de Siri et la protection effective de la vie privée des utilisateurs.
La France renforce son contrôle sur les pratiques des géants américains de la technologie, et Apple fait à nouveau l’objet d’une enquête judiciaire. Cette fois, c’est la gestion des enregistrements vocaux par son assistant Siri qui est au cœur des préoccupations. Le parquet de Paris a ouvert une enquête à la suite d’une plainte déposée par la Ligue des droits de l’Homme, une organisation de défense des droits humains. Celle-ci s’appuie notamment sur le témoignage d’un ancien sous-traitant d’Apple, Thomas le Bonniec, qui affirme avoir été amené, dans le cadre de son travail, à écouter des enregistrements d’utilisateurs, y compris des conversations sensibles.
La protection de la vie privée remise en question
Apple a toujours affirmé que la confidentialité des utilisateurs était une priorité. Dans un article publié en janvier 2025, l’entreprise rappelait que les données vocales de Siri étaient traitées localement sur les appareils compatibles, et que les enregistrements n’étaient conservés qu’avec le consentement explicite des utilisateurs, dans le but unique d’améliorer le service. L’entreprise précise également qu’aucun profil marketing n’est créé à partir de ces données, qu’elles ne sont pas utilisées à des fins publicitaires, et qu’elles ne sont jamais vendues à des tiers. Les utilisateurs ont par ailleurs la possibilité de refuser que leurs enregistrements soient conservés.
Pourtant, le témoignage de Thomas le Bonniec, qui travaillait pour Apple à Cork, en Irlande, soulève des interrogations sur le respect effectif de ces engagements. Selon lui, son rôle consistait à écouter et à analyser des extraits audio capturés par Siri, parfois sans que les utilisateurs en aient conscience. Parmi ces enregistrements figuraient des conversations à caractère privé, voire des échanges potentiellement illicites, comme celui d’un présumé pédophile.
La règlementation française est stricte
Cette enquête s’inscrit dans une série de mesures prises par la France pour encadrer plus strictement les activités des grandes entreprises technologiques. En mars 2025, l’Autorité de la concurrence française avait déjà infligé une amende de 150 millions d’euros à Apple pour abus de position dominante dans la distribution d’applications mobiles sur iOS. Par ailleurs, la France applique une taxe de 3 % sur les revenus des géants du numérique, une mesure qui a suscité des tensions avec les États-Unis, où l’ancien président Donald Trump avait menacé de représailles commerciales.
L’enquête sur Siri intervient alors que l’Union européenne renforce également son arsenal juridique avec le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), visant à mieux protéger les droits des utilisateurs et à encadrer les pratiques des plateformes numériques. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), chargée en France de veiller au respect de la vie privée, pourrait être amenée à se prononcer sur cette affaire, notamment sur la conformité des pratiques d’Apple avec le Règlement général sur la protection des données (RGPD).
Apple accusé de manquer de transparence
Si Apple assure que les enregistrements ne sont conservés qu’avec le consentement des utilisateurs et qu’ils sont anonymisés grâce à des identifiants aléatoires, la révélation de l’écoute de conversations par des sous-traitants relance le débat sur la transparence et le contrôle effectif des données personnelles. L’entreprise devra démontrer que ses mécanismes de protection sont suffisamment robustes pour éviter toute utilisation abusive ou non autorisée des enregistrements vocaux.